C’est une rue hyper touristique à Bangkok idéalement située près des principaux centres d’intérêt et où on trouve de tout : hôtels, guesthouses, bars, échoppes, restaurants, salons de massage, etc… Voilà, le décor est planté ...
Clara voulait profiter encore de Bangkok pour le shopping et avait tenu à ce qu’on réserve une dernière nuit d’hôtel dans cette rue pour ne pas faire comme d’habitude du style « On verra sur place » et on avait trouvé une chambre correcte et pas très chère qu’on avait donc réservé à l’avance ce qui avait permis de la rassurer un peu.
Donc ce dernier matin à Bangkok avant le retour vers la France tout le monde s’est levé tôt pour faire les achats tant attendus, d’autant que la veille la petite avait fait choux-blanc chez « TopShop » le magasin à la mode qui devait lui permettre d’acheter les vêtements à faire pâlir d’envie toutes les copines. Mais voilà le sort s’est bizarrement acharné sur nous à cette occasion à commencer par les tuk tuk ou les taxis qui nous prenaient un prix de la course exorbitant pour nous conduire au magasin sous prétexte que la circulation était dense. Sans attendre que Clara craque et aussi parce qu’elle payait intégralement le taxi nous sommes montés dans la première voiture et avons pu juger de la circulation routière à Bangkok pendant les heures de pointe. 8 km environ plus loin et 2h plus tard on arrivait enfin au centre commercial et on a mis un peu de temps avant d’admettre l’affreuse réalité : le magasin avait brulé pendant les émeutes dans la ville quelques mois plus tôt.
Et pourtant on a tourné dans tous les sens pour trouver ce satané magasin qui affichait du dehors un aspect flambant presque neuf et dans cette ville de près de 12 millions d’âmes c’est tout simplement rageant que le magasin à la mode qui n’existe pas en France et que je vais m’acheter des tas de fringues que j’ai déjà checké par internet et qu’il faudra surement acheter une autre valise pour rapporter tout ça à la maison soit parti en fumée et que visiblement les malheureuses boutiques dans le coin ayant subies le même sort se comptaient sur les doigts d’une main. Je dirais même que c’est plutôt ballot !
Point de découragement et on est rentré dare-dare dans notre rue bien aimée pour faire déjà une soirée de prospection avant la terrible journée d’achats du lendemain ce qui n’a pas empêché de rentrer à l’hôtel les bras chargés de sacs et colis en tout genre, on sait jamais, les stocks vont peut-être disparaître, la frénésie d’achats va atteindre les autres touristes nombreux à cette période de l’année, les magasins seront surement fermés demain samedi ou pire les émeutes vont reprendre … dans Khao San road !
Dès la tombée du jour, la rue s’anime un peu plus, les échoppes mobiles avancent d’un cran au centre de la route car la circulation automobile n’est plus permise ce qui fait plusieurs couches entremêlées de magasins et de restaurants ambulants où les brochettes variées, les pad thaï et autres noddle soupes sentent bon la cuisine locale. C’est aussi l’occasion pour les bars d’attirer le chaland avec leurs bières et leurs cocktails au rabais ou au litre et les télévisions toutes branchées sur le championnat de première ligue Anglaise pour assouvir un des besoins primaires de tout bon citoyen Britannique : supporter par tous les moyens leur équipe de foot favorite où qu’ils se trouvent sur cette planète pourvu aussi que la bière coule à flots. Il y a du monde, ça se bouscule, on marche dans la rue qui n’est pas bien longue dans un sens puis dans l’autre et puis encore et encore jusqu’à connaître par cœur les produits vendus, la tête des vendeurs, les prix affichés, les prix négociés au plus bas et leur code barre.
Et donc ce matin on est fin prêt, presque sur le pied de guerre, les cartes visa ont à nouveau pris un coup de chaud dans les distributeurs de billets, la rue est plus calme que la veille au soir, normal les britanniques sont tous au lit ou aux toilettes suite aux excès de bière de la nuit; et non pas tous, avec une bouteille à la main il y a encore 3 jeunes irréductibles qui braillent des trucs incompréhensibles et invectivent les passants du bar où ils sont assis ce qui en aucune façon sert l’honneur de leur patrie (c’est peut-être pas des Grands bretons d’ailleurs mais ça braille en anglais et l’un d’eux doit avoir une tête ressemblant à celle du prince Charles petit, à l’exception notoire des oreilles).
Pas de problème, nous terminons notre petit déjeuner tranquillement et partons à l’assaut des ultimes marchandises convoitées : T-shirts, sacs en bandoulière, bijoux, breloques, babioles pas chères, parce que faut pas déconner, pour les participants du grand jeu de l’été. Après l’heure du déjeuner j’en ai plein les pattes dans mes tongs, je ne suis pas le seul, et on se laisse tenter par du «Fish massage» ou comment les petits poissons vont pouvoir soulager nos douleurs.
En fait normalement les poissons mangent les peaux mortes et vous laissent dans un état de bien être total. OK, on y va et après un nettoyage des pieds un peu sommaire on va faire trempette dans le bac à poisson. Tout de suite et sans vouloir me vanter, les bébêtes se sont mises à bonne distance de mes jambes et me regardaient avec des yeux ronds et méfiants comme si l’épisode du marigot au Guatemala (Lire l’article "Dans le Marigot") était maintenant passé à la postérité chez les poissons au même titre que l’invasion des huns ou la retraite de Russie pour nous humains ! Ils se sont par contre vengés sur les pieds et mollets de Carole, et de Clara qui n’arrêtait pas de glousser tellement c’était chatouilleux et je me demande encore comment elle a bien pu les laisser dans l’eau aussi longtemps.
Après les poissons et comme les filles voulaient faire un soin du visage, je me suis laissé tenter par un massage du corps ce qui constituait pour moi une première.
Nous voilà partis pour un salon digne de ce nom et surtout à l’abri des regards indiscrets ce que nous trouvons assez rapidement et sommes accueillis tout de suite par un … gay man, fort gentil au demeurant et à qui j’ai eu le tort de commander un massage avec de l’huile. Si à cet instant j’avais pu anticiper la suite je serais allé avec les filles et sans honte pour le soin du visage en 10 étapes avec les concombres sur la tronche à la fin. Carole et Clara vont rapidement dans une salle particulière et me laissent seul avec le gay man jovial et souriant qui me conduit dans la pièce des massages, des matelas sont à même le sol, il y a déjà une personne dans les lieux pour un massage des pieds et mon hôte me conduit tout au fond, me demande de me mettre en caleçon, de m’allonger et d’attendre. Ce que je fais, mais après qu’il ait tiré les rideaux pour isoler l’espace et surtout qu’il ait le dos tourné à la recherche de la masseuse thaïlandaise. Grosse méprise de bleusaille, et ce n’est pas tout à fait de la déception que j’ai ressenti quand je l’ai vu se pointer quelques minutes après avec le flacon d’huile à la main, ARGH ! il a les yeux pétillants et un sourire qui lui fait une banane jusqu’aux oreilles ! C’est lui le masseur !
Dans ces moments de grande solitude mon cerveau travaille à la vitesse du dernier multi processeurs d’Intel pour tenter de trouver une solution raisonnable. Vais-je le répudier en demandant ma masseuse ? Vais-je lui demander où sont les toilettes pour me permettre un plus long moment de réflexion et surtout parce que bizarrement j’ai tout de suite des crampes à l’estomac ? Vais-je lui donner l’argent tout de suite et abréger la séance prétextant une erreur dans mes intentions premières de massage à l’huile ? En fait mon haut niveau de tolérance (à quel niveau je me le demande ?) me dit que c’est peut-être un bon masseur et que même si je peux être son type, il ne va rien se passer. Je suis sur le ventre, ses mains huileuses me parcourent le dos et va savoir pourquoi, j’ai un peu de mal à me détendre ! Mais que fait-il ? Le bougre est en train de descendre mon caleçon pour laisser libre cour à ses pérégrinations … sur mes fesses. ARGH ! Mon heure est venue, je vais passer à la casserole ! Mon multi processeur est en état d’alerte, les circuits primaires sont déconnectés, le frein de secours est actionné ... je me contracte tout de suite en serrant les fesses pour limiter la casse et en pensant parallèlement aux actions de défenses ou de représailles. Mon sixième sens me dit qu’il est lui-même dans un état second et en extase et donc qu’il faut réagir vite et pourquoi pas en lui balançant sur le champ un coup de pied dans les c....... ! Là il l’a échappé belle car aussitôt la décision prise et avant la mise en exécution je me suis rappelé que quelqu’un (peut-être Carole ?) m’avait dit que les fesses faisaient partie du protocole de massage ou alors mon cerveau m’a bien eu en me faisant croire que tout était normal pour éviter la confrontation directe genre que c’est une invention par greffe de mémoire fictive (voir le film Total recall) , va savoir ! Il n’a donc pas eu droit au coup de pied immédiat dans les c....... mais il a plutôt intérêt à faire gaffe, je l’ai à l’œil, enfin presque parce que je suis toujours allongé sur le ventre. Je fais ensuite un calcul rapide, il me reste environ 50 minutes à serrer les fesses en priant très fort qu’il ne se passe rien et que si c’est le cas je vais lui donner un bon pourboire parce que : si il me demande si j’en veux plus je lui dis dans la micro seconde d’après « non merci » et me barre en courant, s’il fait un geste déplacé il aura droit à un coup de pied dans les c......., s’il me serre d’un peu trop près c'est un coup de pied dans les c......., si je sens son souffle chaud sur ma nuque, un coup de pied dans les c......., etc … Cette solution extrême est d’autant plus facile à mettre en œuvre car au milieu du parcours (du combattant) je me retrouve sur le dos, ARGH ! Il me tripatouille les pieds, et les jambes, et le torse, et les bras, et la tête … alouette ! Ne rigolez pas SVP, c’est pas vraiment drôle. A l’heure où j’écris ces quelques moments de pure frayeur j’ai des sueurs froides et les poils des bras qui se hérissent. Le coup de pied dans les c....... a un effet double impact et semble vraiment redoutable car après sa mise en œuvre, s’il ne comprend pas dans un premier temps ma désapprobation à l’encontre de ses intentions, au moins il aura du mal à mettre ses menaces à exécution, d’autant que j’ai l’intention d’appuyer ma frappe comme au temps où je pouvais mettre un coup-franc direct dans la lucarne des 30 mètres.
Au final le gay man (alias le masseur au large sourire qui en dit long sans vouloir le dire) aura droit à un bon pourboire, il va me faire comprendre qu’il me sentait un peu tendu, je ne vais pas lui avouer pour éviter le coup de pied dans les c....... inévitable que je n’ai pensé qu’à lui pendant toute la séance, je vais par contre rejoindre à toute vitesse les filles avec plaisir et avec les tranches de concombre sur la tronche, qui vont se marrer à la narration de ma mésaventure. Et je suis épuisé alors que j’espérais être relaxé : tant mieux, je vais pouvoir dormir dans l’avion qui va nous reconduire vers Paris parce que c’est la fin du voyage à Bangkok et en Thaïlande.