De la pluie battante, des orages, des averses tropicales, des tempêtes, du tonnerre, des horizons tout noir… et un peu de soleil…
Alléluia... nous sommes maintenant presque Vietnamiens ! Après notre première nuit sur l’île, nous avons changé d’hôtel et pour l’occasion, pour ne pas devoir à nouveau négocier sans fin avec l’hôtel et avec le taxi, on a loué des motobylettes (noms affectueux que nous donnons à nos chères mobylettes) pour transporter nos valises; et 2 personnes sur une motobylettes avec une valise c’est déjà s’immerger un peu dans le quotidien des habitants du pays. On a, à partir de cette première expérience concluante et rigolote, imaginé aller plus loin encore dans l’immersion… et pourquoi ne pas rouler à trois avec le même engin ? Malheureusement un gros orage la dernière soirée à contrarié nos plans de sortir diner en ville avec un seul scooter et nous sommes restés tranquillement dans notre hôtel pour manger.
Tout nous est maintenant possible : être à 3 sur la motobylette mais avec tous les bagages, même configuration mais je suis en train de téléphoner avec mon portable, Clara dort au milieu et il faut la tenir pour éviter qu’elle ne bascule, le casque de pacotille s’envole et on le rattrape in-extrémis, on fait demi-tour dans la circulation intense sans prévenir et sans regarder, on roule en sens inverse sur les autoroutes, le 2 roues est à moitié pourri, les freins ne fonctionnent plus et on est sur une forte pente boueuse avec un camion-citerne qui fonce à tombeau ouvert et qui double en roulant dans l’autre sens, on prend en « moto-stop » toute une famille Viet avec la grand-mère ou l’équipage d’un bateau de pêche avec les paniers de poissons attrapés la veille (non, ça on ne pourra pas faire car ça sent vraiment mauvais !)…
Fini les balivernes et revenons vers notre première journée sur l’île; vue d’avion c’est tout vert et on le voit d’autant mieux que rares sont les petits nuages qui flottent entre deux eaux (est-ce suffisamment clair ?). Cette situation météorologique quelque peu inattendue a fait tout de suite dire à Carole que les prévisionnistes du site météo consulté le jour même s’étaient carrément plantés et que c’était tant mieux, et surtout que le « tube de l’été » allait être pour cette fois celui de la crème solaire (protection maximale). Les dieux du ciel ont pour l’occasion été cléments mais aussi un peu taquins car la situation n’a pas perdurée. Le lendemain nous sentions que le temps allait se gâter sévèrement, sans pour autant imaginer clairement l’étendu des dégâts ! Adieu alors baignades tranquilles sur une mer d’huile, siestes sur les transats et coups de solei … on avait bien fait d’apporter les panchos !
Les jours suivants, la tempête s’est déchaînée et les trombes d’eau sont tombées de jour comme de nuit, éclairs et coups de tonnerre en prime.
Entre 2 averses et sur les chemins de latérite détrempés, nous avons fait le tour de l’île avec toujours ce sentiment d’allégresse dès que nous enfourchons nos chères montures. Nous avons également profités de massages quotidiens sur la plage (mais à l’abri !) qui m’ont définitivement réconciliés avec ces soins corporels finalement apaisants, après la très mauvaise expérience de Bangkok (lire l’article « Une journée à Khao San Road »).
Une matinée, nos motobylettes nous ont conduits délibérément à la ferme des perles (de culture) où après une explication alambiquée et en anglais sur comment en ouvrant une huitre de la ferme on tombait inexorablement sur une perle, plus ou moins grosse, plus ou moins ronde et donc plus ou moins jolie, mais là n’était pas vraiment le but de la visite, les vendeuses ne savaient plus où donner de la tête et de la calculette. Carole et Clara s‘en donnaient à cœur joie. Les vitrines s’ouvraient, se vidaient et se refermaient, les boîtes s’accumulaient sur le comptoir. Les bananes s’élargissaient sur le visage radieux des vendeuses de plus en plus nombreuses (du style, on a dégotté des clients sérieux et fortunés) tandis que j’entendais de plus en plus distinctement la complainte lancinante de la carte Visa qui sentait bien qu’elle aurait un rôle prépondérant à jouer dans cette mise en scène dramatique (pour elle !).
Une autre journée, nous nous sommes laissés tenter par un tour organisé tout compris pour la visite en bateau de petits îlots dans le sud avec baignade, pêche et snorkeling assurés (à prononcer snor-ke-ling ou plus simplement plongée avec masque, palmes et tuba). Contre toute attente cette journée a été exceptionnelle. Le guide était bien là à l’heure dite vers 8h30 à notre hôtel. Le trajet vers le port est rapide et en voiture privée. Le bateau nous attend avec les autres touristes, les boissons fraîches nous sont rapidement servies et on commence notre balade nautique. On a tous le sourire et ça fait plaisir à voir. Quel paysage merveilleux que ces ilots luxuriants, ces plages vierges et de sable blanc, ce bleu turquoise sous le soleil radieux. De loin en loin nous voyons des singes et des oiseaux multicolores dans la végétation. C’est le moment de la pêche, les cannes dernier cris sont distribuées avec les appâts. Incroyable : les poissons de toutes tailles mordent à l’hameçon, personnellement et malgré la malédiction qui pèse sur moi habituellement j’attrape des poissons monstrueux (quant à la taille). Bientôt on nous sert le repas de fruits de mer et on ne s’est vraiment pas foutu de nous ! Ensuite c’est le moment du snorkeling et on peut aisément se rendre compte à partir du bateau et avec la transparence des eaux de la richesse des coraux et de la faune marine. Je suis émerveillé par les bancs de poissons multicolores qui passent devant mon masque, j’aperçois plusieurs fois des groupes de calamars, des tortues et des barracudas de grande taille …
Et… non je n’irai pas plus loin dans la description de cette journée idyllique (mais fictive) pour laquelle nous avions de grands espoirs, au regard du « flyer » distribué par les agences touristiques, papier glacé et photos alléchantes.
En vérité, le guide était bien là à l’heure dite… mais nous avons attendu le premier minibus devant notre hôtel (il allait récupérer d’autres pigeons touristes comme nous). Nous sommes ensuite transférés sur un minibus plus gros mais… pour prendre les places situées sur l’essieu arrière ! Heureusement on est rapidement débarqué pour un troisième minibus qui finira, après la collecte d’autres pigeons touristes, par prendre la route boueuse de notre port d’embarquement. Après un temps infini sur une route chaotique et détrempée on s’arrête enfin… à la ferme des perles pour 20 minutes de shopping imposé (qui se termineront par un bon ¾ d’heure à cause d’un couple de Russes qui a joué le rôle du pigeon à fond, bien que très hésitant sur la couleur de la bague ou la forme du bracelet). 2 heures après notre départ, nous arrivons enfin sur la plus belle plage de l’île (j’ai rien inventé, c’est sur le « flyer » qu’on a conservé pour preuve), les gargotes sont installées directement sur le sable, les jet skis circulent à grande vitesse entre les barques à moteur qui emportent les touristes médusés vers les dizaines de bateaux (tous identiques) qui sont au mouillage un peu plus loin, des sacs plastiques surnagent de part en part dans cet imbroglio aquatique. On part enfin sous un ciel menaçant mais, coup de bol, avec peu de gens à bord comparativement aux autres bateaux (on était le reliquat de la fournée du jour). Vient le moment de la pêche sur le premier ilot venu et on nous distribue un bout de fil autour d’une bobine en plastique avec un hameçon rouillé. Seul l’équipage arrive à attraper des petits poissons de roche alors que le bateau est au mouillage dans la houle, ça tangue et ça bouge dans tous les sens… Je ne vous fais pas un dessin sur mon score de pêche personnel ! Sur l’autre face de l’ilot on va se mettre à l’eau avec les masques et palmes qui ne sont pas tous à notre taille. Ce n’est pas très grave car l’eau est trouble et les fonds marins peu riches en poissons et coraux. Pendant la baignade un grain arrive, le ciel est noir et ça tombe dru, l’équipage nous récupère comme il peut, installe des bâches de fortune pour éviter qu’on soit complétement trempés pendant le déjeuner alors que nous voguons en sens inverse vers la plage de départ. Le guide nous apporte dans un premier temps des oursins (oh miracle) pour nous dire tout de suite qu’il faut payer un supplément si on veut y goûter ! (les oursins resteront intacts sur la table, na !). Le reste du repas (compris dans la prestation) est sans saveur, à l’image des visages de chacun. On a le droit pour finir à une heure d’attente, plus que de détente, sur la plage d’embarquement du début. Encore heureux, on ne va pas s’arrêter une autre fois à la ferme des perles sur le chemin du retour en minibus. Et quand le guide nous demande si on a passé une bonne journée, surtout lui répondre « oui » sans hésitation pour éviter les polémiques.
Là, Clara aurait pu me rappeler gentiment qu’il ne fallait pas confondre « Rêve » et « Réalité » ! Elle a bien fait de ne rien dire car je lui en aurai « collée une » !
Bientôt c’est le départ de l’île (les vacances passent trop vite même sans soleil !) et entre 2 vols avant de revenir sur Hanoï on profite d’une journée (encore) pluvieuse à Saïgon (same same Ho Chi Minh City). Entre les averses on laisse nos valises à la consigne de l’aéroport (c’est très cher ), on va manger, on fait le tour du palais de la réunification (pas très intéressant d’un point de vue architectural, surement plus au niveau historique), on passe furtivement devant la cathédrale en courant presque sous la pluie, on entre dans la poste centrale qui constitue un vestige plutôt bien conservé de l’architecture coloniale Française et on finit par le « musée des vestiges de la guerre » qui s’appelait dans le passé le « musée des crimes de guerre Américains » ou quelque chose dans le même genre. Après la visite, mon opinion est que ce musée n’aurait jamais du être débaptisé, même pour s’inscrire dans le politiquement correct.
Le bâtiment sur 3 étages n’est pas très grand, et à part quelques avions et divers chars d’assaut, pièces d’artillerie ou bombes de tout type dans la cour, plus une collection d’armes légères à l’intérieur, il abrite surtout des expos de photos avec commentaires à l’appui, qui dans la plupart des cas ne sont pas nécessaires (les commentaires !) car les images se suffisent à elle mêmes. Le rez-de-chaussée est essentiellement consacré aux campagnes anti-guerre du Vietnam orchestrées dans le monde et aux divers actes d’objection de conscience dans le camp Américain et j’ai survolé les photos le cœur léger avec la conviction qu’il existe quand même des gens sensés et assez courageux pour défendre leurs opinions pacifiques. A partir du deuxième étage, c’est une autre histoire et c'est le choc, on a beau savoir un peu ce qui s’est passé ici au Vietnam, on est, là, à nouveau plongé dans l’horreur : les corps déchiquetés, les exécutions sommaires, les têtes tranchées, les razzias et massacres pour le plaisir, les femmes, les vieillards, les enfants décimés et les corps à terre, les millions de bombes larguées n’importe où, les lance-flammes, les villages en feu, le napalm, les mines (toujours présentes), les défoliants, les presque 3 millions de civils zigouillés ou disparus, l’agent orange, la dioxine, les champs, les forêts, les rizières, les rivières pulvérisés, la contamination pour au moins 7 générations d’homme à venir, les sols souillés, les corps informes, tordus, monstrueux qui naissent tous les jours depuis, Seveso puissance mille, les regards apeurés, terrifiés, les rictus de douleur, les expressions d’incompréhension sur les visages des habitants de l'époque, l’imagination humaine sans limite pour la destruction et la mort ...
Putain de guerre !!!!!
(et on ne nous montre pas, bien évidemment, les horreurs probables commises par l’autre camp !)
(N.B. ceci n'est pas une image de propagande volontaire)
Le lendemain nous étions à Hanoï pour notre dernière journée sur le sol vietnamien. Dès le matin, coquin de sort, le ciel était clair, lumineux et sans nuage, promesse d’une journée radieuse… Putain de soleil !!!!!